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Actualités juridiques

Modifications 2022 de la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption

SYNTHESE :

Les dispositions de l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 portant application de la Loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption (modifiée par la Loi n° 1.520 du 11 février 2022) ont été retouchées à trois reprises en 2022, par:

  • Ordonnance Souveraine n° 9.125 du 25 février 2022 (finalisation de la mise à niveau avec la 5e Directive (UE) anti blanchiment et financement du terrorisme) ;
  • Ordonnance Souveraine n° 9.170 du 4 avril 2022 (procédure CERC) ;
  • Ordonnance Souveraine n° 9.223 du 28 avril 2022 (diplômes ou compétences professionnelles, certification professionnelles des responsables de la mise en œuvre du dispositif LCB/FT-C dans le secteur bancaire et financier).

PRESENTATION :

— Ordonnance Souveraine n° 9.125 du 25 février 2022 (JDM n° 8580 du 4 mars 2022)

L'Ordonnance n° 9.125 modifie l’Ordonnance Souveraine n° 2.318, tenant compte des récentes modifications apportées à la Loi n° 1.362 et de la décision du Tribunal Suprême TS 2021-18, 2021-19, 2 décembre 2021, Chambre monégasque de l’horlogerie et de la joaillerie, UCAM et FEDEM c/ Etat de Monaco ayant annulé les art. 1er et 2 de l’Ordonnance Souveraine n° 8.634 du 29 avril 2021 (qui avaient ajouté un chiffre 26° à l’art. 1er et l’art. 1-1 à l’Ordonnance Souveraine n° 2.318). [1]

Modifications opérées par l'Ordonnance n° 9.125 :
  • Modification de l’art. 1er : définitions ;
  • Modification de l’art. 5 : identification et vérification de l’identité du client personne morale ;
  • Modification de l’art. 12-1 : rapport écrit des résultats de l’Examen Particulier (EP) du contexte et de la finalité des transactions atypiques et opérations impliquant une contrepartie ayant des liens avec un Etat ou un territoire à haut risque ;
  • Modification des art. 13, 14 : identification des Bénéficiaires Effectifs (BE) ;
  • Modification de l’art. 24 : Personnes Politiquement Exposées (PPE/PEP) ;
  • Suppression de l’art. 33 : transmission d’un rapport sur les procédures de contrôle interne, de communication et de centralisation des informations destinées à la prévention du blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme et de la corruption, selon le cas au Procureur Général ou au Bâtonnier du Conseil de l’Ordre des avocats-défenseurs et avocats ;
  • Modification de l’art. 51 : Groupe de contact de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive et la corruption ;
  • Modification des art. 55, 56, 57, 58 et suppression des art. 56-1, 56-2 : procédure devant la Commission d’Examen des Rapports de Contrôle (CERC) ;
  • Modification de l’art. 64 : fixation des montants prévus par la Loi n° 1.362.
[1] Le Tribunal Suprême a annulé :
- d’une part, l’art. 1er de l’Ordonnance Souveraine du 29 avril 2021 qui ajoutait à l’article 1erde l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 un chiffre 26° ainsi rédigé : « les personnes visées au chiffre 26°) de la loi n° 1.362 du 3 août 2009, modifiée, susvisée : notamment les commerçants et personnes organisant la vente, la location de biens suivants : antiquités, matériaux précieux, pierres précieuses, métaux précieux, bijoux, horlogerie, maroquinerie, véhicules terrestres, aériens ou maritimes et autres objets de grande valeur » (méconnaissance de la portée du chiffre 15° de l’art. 1er de la Loi n° 1.362) ;
- d’autre part, l’art. 2 de l’Ordonnance Souveraine du 29 avril 2021 qui insérait dans l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 un article 1-1 ainsi rédigé : « Les commerçants et personnes visés au chiffre 15°) de l’article premier de la loi n° 1.362 du 3 août 2009, modifiée, susvisée, déclarent au Service d’Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers, dans des conditions fixées par arrêté ministériel, les transactions ou séries de transactions liées, réglées en espèces, dont le montant est égal ou supérieur au montant fixé au deuxième alinéa de l’article 64 » [10.000 euros] (incompétence du pouvoir réglementaire, cette obligation déclarative n’étant pas prévue par la Loi n° 1.362).

Présentation détaillée > Version PDF

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— Ordonnance Souveraine n° 9.170 du 4 avril 2022 (JDM n° 8585 du 8 avril 2022)

L'Ordonnance n° 9.170 du 4 avril 2022 apporte les deux modifications suivantes (ajout et suppression) à l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 :

> Composition de la CERC – Demande de récusation :

Les modalités de récusation d’un membre de la Commission d’Examen des Rapports de Contrôle sont définies au nouvel article 57-1 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 du 3 août 2009 modifiée (par application de l’article 65-1, 7e alinéa, de la Loi n° 1.362), comme suit :

« La composition de la commission, en ce compris le rapporteur désigné, est communiquée à la personne mise en cause avec la convocation visée au premier alinéa du précédent article.
Une demande de récusation d’un membre de la commission peut être formée par acte motivé auprès du secrétaire général de la commission par la personne mise en cause ou son mandataire, au plus tard dans un délai de dix jours ouvrables à compter de la notification de la composition de la commission.
À peine d’irrecevabilité, la demande doit viser nominativement le membre concerné de la commission, indiquer avec précision les motifs de la récusation et être accompagnée des pièces justificatives des motifs de récusation invoqués.
Il est délivré récépissé de la demande par le secrétaire général.
Le membre de la commission qui fait l’objet de la demande de récusation en reçoit copie.
Dans un délai de huit jours ouvrables à compter de cette communication, il fait connaître par écrit soit son acquiescement à la récusation, soit les motifs pour lesquels il s’y oppose.
S’il acquiesce, le Président, ou s’il est visé par la demande de récusation, le Vice-Président, demande au membre récusé de s’abstenir de siéger et lui substitue un autre membre pour compléter la commission qui statue sur l’affaire en son absence.
S’il conteste les motifs de la récusation ou à défaut de réponse dans un délai de huit jours ouvrables, la demande de récusation est examinée par la commission sans la participation du membre concerné par la demande de récusation.
La commission se prononce sur la demande de récusation par une décision non motivée insusceptible de recours.
Lorsque la récusation est admise, le Président, ou s’il est visé par la demande de récusation, le Vice-Président, demande au membre récusé de s’abstenir et lui substitue un autre membre pour compléter la commission. Avis en est donné par le secrétaire général à la personne mise en cause.
Lorsque la récusation est rejetée, le secrétaire général donne également avis à la personne mise en cause de la décision de la commission.
Ne peuvent être remis en cause les actes accomplis par le membre récusé avant qu’il n’ait eu connaissance de sa récusation. ».

> Accès aux informations du registre des bénéficiaires effectifs par les assujettis à la loi n° 1.362 dans le cadre de la mise en œuvre de leurs obligations de vigilance (en application de l’art. 22-6, premier alinéa chiffre 2°) de la Loi n° 1.362) :

Le dernier alinéa de l’art. 62 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.318, imposant l’information préalable de la personne morale concernée par la demande d’accès, est supprimé : « Préalablement à la communication de l’extrait, la personne morale concernée est informée par le service du répertoire du commerce et de l’industrie de cette demande d’accès aux informations du registre, par lettre recommandée avec accusé de réception ou suivant un envoi électronique qualifié. »

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— Ordonnance Souveraine n° 9.223 du 28 avril 2022 (JDM n° 8589 du 6 mai 2022)

L'Ordonnance n° 9.223, prise en application de l’article 27, 4e alinéa de la loi n° 1.362[1], a introduit dans l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 les conditions de diplôme ou compétences professionnelles, de formation et de certification professionnelle des responsables de la mise en œuvre du dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption désignés par les établissements de crédit, de paiement, de monnaie électronique, et les personnes exerçant des activités financières (organismes et personnes visés aux chiffres 1°) à 3°) de l’article 1er de la Loi n° 1.362)[2]. L’Association Monégasque des Activités Financières (AMAF) est chargée d’organiser la formation donnant lieu à la délivrance de la certification professionnelle.

Ces nouvelles dispositions insérées dans l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 (nouveaux articles 31-1 à 31-4) entreront en vigueur le 7 novembre 2022 (6 mois après la publication de l’Ordonnance Souveraine n° 9.223).

A noter :
• Les responsables de la mise en œuvre du dispositif de LCB/FT ainsi que les personnes placées sous leur autorité qui sont en fonction depuis moins de cinq ans au jour de l’entrée en vigueur, doivent s’inscrire, par l’intermédiaire des organismes ou des sociétés au sein desquelles elles exercent, à la première session de certification professionnelle à compter de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions.
• Seuls les responsables de la mise en œuvre du dispositif de LCB/FT ainsi que les personnes placées sous leur autorité qui sont en fonction de manière ininterrompue depuis au moins cinq ans au jour de l’entrée en vigueur, sont réputés disposer des connaissances requises pour les fonctions qu’ils exercent, et donc ne sont pas soumis au régime des nouveaux articles 31-1 et 31-3 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.318.

Nouvelles dispositions (art. 31-1 à 31-4 de l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 ) :

> Conditions de diplôme ou de compétences professionnelles dont doivent justifier, pour leur recrutement, les responsables de la mise en œuvre du dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption (« responsables LCB/FT-C ») :

1°) être titulaires soit, d’une maîtrise ou d’un Master I ou d’un diplôme sanctionnant au moins quatre années d’études supérieures après le baccalauréat, dans les domaines bancaire, financier, économique ou juridique, soit d’un diplôme reconnu comme équivalent par l’organe de direction effective du professionnel ;

2°) à défaut, justifier d’une expérience acquise dans l’un des domaines visés au précédent alinéa, au terme d’un temps de pratique professionnelle considéré comme suffisant par l’organe de direction effective du professionnel.

> Obligation de s’inscrire à une session de formation, par l’intermédiaire des organismes ou des sociétés au sein desquelles les responsables LCB/FT-C exercent, dans le délai de six mois à compter de leur entrée en fonction, en principe (pour des motifs de service ou d’organisation interne, un délai supplémentaire peut être sollicité auprès de l’AMAF), à l’issue de laquelle est délivrée une certification professionnelle.

L’organisation de la formation est confiée à l’AMAF, ce qui inclut :

1°) l’organisation des sessions de formation portant sur un enseignement dispensé sur le temps de travail rémunéré, en matière de LCB/FT-C ;

2°) la détermination du contenu des enseignements dispensés au cours des sessions de formation, ainsi que le niveau des connaissances et des compétences minimales requises pour la délivrance de la certification ;

3°) l’organisation d’un examen de connaissances à l’issue des sessions de formation, lequel est sanctionné par la délivrance, aux personnes déclarées reçues au terme des épreuves, d’une certification professionnelle visée conjointement par l’AMAF et le Service d’Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers ( « SICCFIN »).

Le Règlement précisant les modalités des examens est établi par l’AMAF et validé par le SICCFIN, après consultation de la Commission de certification professionnelle « lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption », nouvellement instituée (toute modification du règlement doit être également validée par le SICCFIN, après consultation de ladite Commission). Ledit Règlement est publié sur le site Internet de l’AMAF (https://www.amaf.mc/).

La Commission de certification professionnelle LCB/FT-C a pour mission de rendre des avis (par un vote à la majorité des membres présents, le Président ayant une voix prépondérante) sur toute question relevant de sa compétence en application de l’Ordonnance Souveraine n° 2.318 et du Règlement précisant les modalités des examens. Elle est composée des membres suivants :

• Président de l’AMAF ou toute personne qu’il désignera pour le représenter, Président de la Commission ;

• Vice-Présidents de l’AMAF ;

• Secrétaire Général de l’AMAF ;

• Directeur du SICCFIN ;

• Secrétaire Général de la Commission de Contrôle des Activités Financières (« CCAF ») ;

• six membres maximum désignés chaque année par le bureau de l’AMAF en raison de leurs compétences dans le domaine de la prévention du blanchiment de capitaux, du financement du terrorisme et de la corruption et de leur connaissance du tissu économique monégasque.

Les délibérations et avis de la commission sont inscrits dans un registre tenu par l’AMAF à la disposition du Conseiller de Gouvernement-Ministre des Finances et de l’Économie. Toute personne peut solliciter la consultation dudit registre auprès de l’AMAF sous réserve que sa demande soit justifiée.

[1] Article 27, 4e alinéa de la Loi n° 1.362 : « Les personnes désignées en qualité de responsable par les organismes et les personnes visées aux chiffres 1°) à 3°) de l’article premier, doivent justifier, pour leur recrutement, de conditions de diplômes ou de compétences professionnelles définies par ordonnance souveraine. Pour l’exercice de leur fonction, elles sont tenues, ainsi que les personnes placées sous leur autorité, d’obtenir une certification professionnelle à l’issue d’une formation, délivrées dans des conditions prévues par ordonnance souveraine. Le coût de cette certification professionnelle et de la formation incombe aux organismes et aux personnes visés aux chiffres 1°) à 3°) de l’article premier. »
[2] Organismes et personnes visés aux chiffres 1°) à 3°) de l’article 1er de la Loi n° 1.362 :
« 1°) les établissements de crédit y compris les succursales établies sur le territoire de la Principauté d’établissements de crédit dont le siège social est situé à l’étranger, et les sociétés de financement ;
2°) les établissements de paiement et les établissements de monnaie électronique y compris les succursales établies sur le territoire de la Principauté d’établissements de paiement ou de monnaie électronique dont le siège social est situé à l’étranger ;
3°) les personnes exerçant les activités visées à l’article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007 sur les activités financières, modifiée ; »

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