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07

oct.
2025

Actualités juridiques

Droit immobilier et de la construction

07/ oct.
2025

Actualités juridiques

Droit immobilier et de la construction

Proposition de loi n° 271 relative à certaines activités et professions immobilières (adoptée)

La proposition de loi n° 271 relative à certaines activités et professions immobilières (origine parlementaire), a été reçue par le Conseil National le 24 septembre 2025 et adoptée le 2 octobre 2025.

La proposition de loi n° 271 (18 articles) porte adaptation "aux réalités économiques et professionnelles actuelles" de la Loi n° 1.252 qui "constitue le texte fondateur du cadre juridique applicable aux professionnels de l'immobilier à Monaco" (celle-ci fixe les conditions d'accès et d'exercice des professionnels du secteur immobilier, l'autorisation administrative préalable, les garanties professionnelles). (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

A noter : une proposition de loi adoptée par le Conseil national est transmise au Gouvernement qui a la possibilité de la transformer en projet de loi ou d'interrompre la procédure législative.

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SYNTHESE

La révision ciblée des dispositions de la Loi n° 1.252 du 12 juillet 2002 sur les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, modifiée (nouvelles exigences pour la délivrance de l'autorisation administrative, création d'une carte professionnelle, obligation de formation, interdiction pour les personnes non autorisées de réaliser toute forme de publicité commerciale telles des annonces immobilières, etc.) tient compte "des attentes des professionnels de la place et notamment de la Chambre Immobilière Monégasque", avec l'objectif de "garantir un haut niveau de professionnalisme au sein du secteur, tout en prémunissant les résidents et les investisseurs contre les risques liés à l’intervention d’acteurs non habilités". (Rapport de la Commission Finances et Économie Nationale sur la proposition de loi n° 271)

Cette réforme visant à une "professionnalisation renforcée des acteurs du secteur" est motivée par l'évolution du "contexte économique et juridique (...) devenant plus exigeant", des "attentes de la clientèle" et du nombre d'"exigences techniques et réglementaires qui pèsent désormais sur les professionnels du secteur", la "technicité croissante des opérations, la complexité des montages juridiques et financiers ainsi que les impératifs de transparence et de conformité - notamment en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme -", "la transversalité des compétences dans les domaines du droit immobilier, du droit de la copropriété, du droit des contrats (...) autant d'exigences qui doivent désormais s'imposer comme des standards incontournables pour tout professionnel du secteur." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

La Commission Finances et Économie Nationale a précisé avoir souhaité adopter rapidement cette proposition de loi au motif qu'elle "s’inscrit dans un objectif de protection des intérêts économiques de la Principauté, mais aussi de préservation de l’image d’excellence et de rigueur qui fonde la réputation internationale de Monaco." (Ibidem)

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Dispositif de la proposition de loi n° 271 (voté)

Les modifications de la Loi n° 1.352 envisagées sont les suivantes :

¤ Délivrance de l'autorisation administrative aux personnes physiques et morales :

Pour mémoire, doivent obtenir une autorisation administrative les personnes physiques ou morales qui se livrent à titre de profession habituelle à des opérations portant sur les biens d'autrui qui sont relatives à :

  1. l'achat, la vente, l'échange, la location ou sous-location en nu ou en meublé d'immeubles bâtis ou non bâtis,
  2. l'achat, la vente ou la location gérance de fonds de commerce,
  3. l'achat, la vente de parts sociales non négociables lorsque l'actif social comprend un immeuble ou un fonds de commerce,
  4. la gestion immobilière, l'administration de biens immobiliers et le syndic d'immeubles en copropriété.

→ Tout d'abord, la proposition de loi n° 271 insère deux nouvelles exigences (modification de l'article 3 L. 1.252) :

  • La justification de la résidence effective en Principauté de Monaco pour les pétitionnaires personnes physiques, pour les personnes physiques qui administrent la personne morale pétitionnaire, ainsi que pour les bénéficiaires effectifs de la personne morale chargée de l'administration de la personne morale pétitionnaire.

Cette condition de rattachement territorial vise à "renforcer l'ancrage local des professionnels de l'immobilier, dans un secteur hautement stratégique pour l'économie monégasque (....) garantir que les acteurs économiques impliqués dans ce domaine exercent une présence réelle et stable sur le territoire, condition essentielle pour assurer une surveillance effective de l'activité, favoriser la proximité avec les clients et les institutions locales." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271).

  • De plus, une participation minimale de 25% au capital de la personne morale pétitionnaire est requise pour les personnes (physiques ou morale) qui l'administrent.

Le seuil de 25 % "correspond à un critère internationalement reconnu pour déterminer la qualité de bénéficiaire effectif, tel qu'il est défini dans les standards du Groupe d'action financière (G.A.F.I.) et repris dans l'Ordonnance Souveraine n° 2.318 du 3 août 2009 fixant les conditions d'application de la loi n° 1.362 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive et la corruption, modifiée." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

Cette condition de détention de capital vise ainsi à "renforcer la responsabilité effective des gestionnaires en liant leur fonction à un intérêt économique réel dans la société, afin de s'assurer qu'ils ne sont pas de simples gestionnaires "détachés". Dans un secteur exposé aux risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, il est apparu essentiel que les gestionnaires soient personnellement et financièrement impliqués dans la structure qu'ils gèrent." (ibidem)

→ Ensuite, la proposition de loi n° 271 intègre des dispositions spécifiques aux sociétés anonymes (SAM) et en commandite par actions pétitionnaires (nouvel article 3-1 L.1.252).

Cet ajout vise d'une part, à harmoniser les exigences quelle que soit la forme juridique de la société : "inspirée de la loi n° 1.439 du 2 décembre 2016 portant création de l'activité de multi family office, vise, en premier lieu, à harmoniser le régime applicable aux actionnaires avec celui déjà applicable aux associés, en soumettant les premiers aux mêmes exigences, telles que la moralité, vérifiées dans le cadre de l'autorisation administrative." ; d'autre part à protéger le secteur immobilier en s'assurant au vu "des enjeux économiques et réputationnels, (...) que les actionnaires présentent notamment toutes les garanties de bonne moralité (...) respectent les valeurs et les exigences propres du cadre économique monégasque". (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

→ Enfin, la proposition de loi n° 271 formalise la pratique administrative concernant l'établissement des activités immobilières (nouvel article 3-2 L. 1.252) :

  • Interdiction d'établissement des activités immobilières au domicile du titulaire de l’autorisation administrative, au domicile ou siège social des personnes qui administrent ou gèrent la personne morale.

Cette interdiction formalise la pratique administrative. L'objectif est de "garantir le sérieux, la stabilité et la transparence des structures intervenant dans un secteur particulièrement sensible. L'activité d'agent immobilier, notamment lorsqu'elle concerne les transactions sur immeubles et fonds de commerce, implique une relation de confiance avec la clientèle, le maniement de fonds et la conservation de documents sensibles. Elle ne saurait donc être exercée dans des lieux qui, par nature, échappent à un minimum de visibilité". (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

Cette disposition permet "aux entrepreneurs de bénéficier de conditions d'installation plus souples pour les deux premières années d'exercice, en leur permettant d'établir le siège social de ces activités au sein de bureaux dits "partagés" situés dans un centre de domiciliation, également appelé centre d'affaires". (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

¤ Création d'une carte professionnelle et d'une obligation de formation

→ Nouvelle obligation de détenir une carte professionnelle délivrée par l'administration pour les personnes impliquées dans les activités relatives aux "transactions sur immeubles et fonds de commerce" (nouvel article 11-1 L. 1.252) :

  • Personnes tenues d’obtenir la carte professionnelle : personnes physiques qui administrent ou gèrent une personne morale exerçant lesdites activités ; personnes qui assurent la direction de chaque établissement, succursale ou agence ; personnes occupant des missions (qui seront précisément définies par ordonnance souveraine) assimilées à celles de négociateurs ou d'agents commerciaux (qui seront précisément définies par ordonnance souveraine).
  • Mentions de la carte professionnelle, d'une durée de validité de 5 ans, renouvelable : notamment, l’identité de son titulaire, les activités pour lesquelles il est autorisé ou qu’il exerce et la dénomination sociale ou le nom commercial de l’établissement, succursale ou agence. Tout changement portant sur l’une de ces mentions doit être porté, sans délai, par son titulaire, à la connaissance de l’Administration.
  • La carte professionnelle doit être restituée lors du retrait de l’autorisation d’exercer ou de la cessation du contrat de travail et en cas de modification de l'une quelconque des mentions figurant sur la carte.

Cette mesure vise à "renforcer la professionnalisation du secteur immobilier en Principauté, en introduisant un instrument clair d'identification des personnes habilitées à intervenir sur ce marché". Elle s'aligne sur la pratique de "nombreux pays européens (qui) ont déjà mis en place des dispositifs comparables, faisant de la carte un standard reconnu. A titre d'exemple, la France impose la détention d'une telle carte depuis 1970. En tant que place immobilière internationale, Monaco a tout intérêt à s'inscrire dans un modèle harmonisé avec ceux des autres Etats notamment pour gagner en lisibilité et en crédibilité à l'égard des investisseurs et professionnels étrangers." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

→ Obligation de formation (non diplômante) des personnes concernées par la carte professionnelle (nouvel article 11-2 L. 1.252) :

  • Obligation de suivre une formation au moins une fois au cours de chaque période de 5 ans de validité de la carte professionnelle ;
  • Les personnes appelées à exercer pour la première fois au sein d’une agence immobilière monégasque des missions assimilées à celles de négociateurs commerciaux et qui ne justifient pas des conditions d’aptitude professionnelle déterminées par ordonnance souveraine, sont tenues de suivre une formation dans le délai d'1 an à compter de leur première entrée en fonction. Un délai supplémentaire pourrait être sollicité auprès de l'Administration pour un "motif légitime et dûment justifié".
  • Cette formation serait dispensée par un organisme de formation ou d’enseignement, après concertation avec la Chambre Immobilière Monégasque.
  • Le coût de formation des salariés incombe au titulaire de l’autorisation administrative.
  • Les dispositions transitoires dispensent de cette obligation de formation, les titulaires de l’autorisation administrative, les personnes qui assurent l’administration de l’agence ainsi que celles qui dirigent chaque établissement, succursale ou agence, au jour de l’entrée en vigueur de la loi.

L'objectif de la formation qui "s'inscrit dans la continuité des pratiques actuelles, la Chambre Immobilière Monégasque offrant déjà à ses adhérents la possibilité de suivre des modules de formation dans les domaines liés à leur profession" vise non seulement à "garantir l'actualisation continue des compétences des professionnels dans le domaine de l'immobilier, mais aussi les évolutions dans des domaines connexes tels que le droit des contrats, le droit de l'urbanisme et de la construction, qui imposent un effort permanent d'information et d'adaptation de la part des acteurs du secteur." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

¤ Mandat

→ Instauration de l'obligation, pour le titulaire de l'autorisation administrative, d'établir un mandat écrit l'habilitant à négocier ou à s'engager dans le cadre des opérations se rapportant aux activités immobilières énumérées par la Loi n° 1.252 (modification de l'article 12 L. 1.252)

  • Ce mandat limité dans le temps peut être établi sous forme manuscrite ou électronique dans les conditions prévues aux articles 1163-3 et/ou 1163-4 du Code civil.
  • Aucun bien, effet, valeur, somme d'argent représentatif de commissions, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû au titulaire d'une autorisation administrative ou ne peut être accepté par lui, avant qu'une des opérations visées par la Loi n° 1.252 ait été effectivement conclue et constatée dans un même acte constatant l'engagement des parties.

Ce mandat écrit est "exigé dans les législations étrangères et notamment française". (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

Mandat portant sur des opérations de gestion immobilière (modification de l'article 13 L. 1.252)

  • Le mandataire est tenu de procéder à une reddition de comptes au moins une fois par an, qui impose au mandataire de rendre compte de sa gestion dans un délai raisonnable.

Cet ajustement correspond à la pratique française. (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

¤ Versement de la commission

→ La commission ne pourra être versée qu'au mandataire, titulaire de l'autorisation administrative (modification de l'article 15 L. 1.252)

Cette disposition est motivée par la lutte "contre l'exercice illégal des activités" et vise à "s'assurer que la rémunération liée à une opération immobilière est perçue exclusivement par des professionnels dûment habilités, situés à Monaco, soumis à des obligations de formation, d'assurance, de transparence, et de contrôle
administratif. Elle participe ainsi à la moralisation du secteur et à la protection des acquéreurs, en empêchant la rémunération de pratiques illégales ou de prestations fournies par des personnes non soumises aux exigences légales de compétence, afin d'éviter toute concurrence déloyale et protéger ainsi les professionnels de la place". (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

¤ Publicité commerciale

→ Il est fait interdiction à toute personne physique ou toute personne morale qui n’est pas autorisée sur le fondement de la Loi n° 1.252 de
réaliser toute publicité commerciale, quel qu’en soit le support (physique ou numérique)
, portant sur les opérations qu'elle régit (nouvel article 18-1 L. 1.252)

Exceptions - Cette interdiction ne s'applique pas lorsque :

  • cette publicité est réalisée avec l’accord de la personne autorisée conformément aux dispositions de la Loi n° 1.252 ou, à défaut, du propriétaire du bien objet de la publicité. Le cas échéant, le support de publicité doit mentionner l’identité de cette personne autorisée ou la dénomination commerciale de l’établissement exploité par cette personne.
  • la personne est titulaire de droits de propriété ou de parts sociales de la personne morale titulaire de droits de propriété, sur le bien immobilier situé à Monaco, objet de la publicité.

L'interdiction vise à "prévenir toute usurpation de la qualité de professionnel de l'immobilier par des personnes non autorisées sur le fondement de cette loi, susceptible de créer une confusion auprès du public ou de conduire à des interventions illégales dans le secteur immobilier." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

Est seulement visée par l'interdiction "la publicité réalisée dans une perspective lucrative (...). Aussi, les republications désintéressées des annonces concernant les biens en vente sur les réseaux sociaux, par exemple, ne devront pas tomber sous le coup de cette interdiction." (Exposé des motifs de la proposition de loi n° 271)

¤ Sanctions administratives et pénales

La proposition de loi n° 271 prévoit les sanctions pour le non respect des nouvelles obligations et interdictions envisagées, tout en révisant le quantum de certaines sanctions pénales existantes (à la baisse ou à la hausse) :

→ S'agissant des sociétés anonymes monégasques et en commandite par actions : ajout des sanctions de suspension ou révocation de l'autorisation administrative dans les cas prévus par la loi n° 767 du 8 juillet 1964 relative à la révocation des autorisations de constitution des sociétés anonymes et en commandite par actions, modifiée (modification de l'article 19 L. 1.252)

Infractions passibles d'une amende de 9 000 à 18 000 euros : accomplir une des opérations prévues par la Loi n° 1.252 sans avoir préalablement établi un mandat conforme ; (baisse du quantum de l'amende, actuellement de 18 000 à 90 000 euros) méconnaissance par tout dirigeant de société d'assurance ou son représentant dans la Principauté, de l'obligation de porter sans délai à la connaissance du Ministre d'État toute suspension de garantie, dénonciation de la tacite reconduction ou résiliation du contrat d'assurance de la responsabilité civile professionnelle (nouvel article 19-1 L. 1.252)

Infractions passibles d'une amende de 18 000 à 90 000 euros dont le maximum peut être porté jusqu'au montant du profit éventuellement réalisé : recevoir la rémunération sans être titulaire de l'autorisation administrative ; méconnaissance de l'interdiction de publicité commerciale ; (hausse du quantum de l'amende, actuellement de 9 000 à 18 000 euros) avoir reçu ou détenu des sommes d'argent, biens, effets ou valeurs quelconques ou en avoir disposé sans être titulaire de l'autorisation administrative ; obstacle au contrôle ; négocier, s'entremettre ou prendre des engagements pour le compte du titulaire d'une autorisation administrative sans y avoir été habilité (modification des articles 20, 21 et 22 L. 1252)

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