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03

janv.
2024

Actualités juridiques

Sociétés et fiscalité

Droit des nouvelles technologies et de la communication

03/ janv.
2024

Actualités juridiques

Sociétés et fiscalité — Droit des nouvelles technologies et de la communication

Le Gouvernement interrompt la procédure législative pour les propositions de lois n°256 et n°257 portant création de la Société Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (SURL) et Société d'Innovation Monégasque par Actions (SIMA)

Le 15 juin 2023 ont été adoptées les propositions de lois n° 256 et n° 257 (déposées le 9 mai 2023) portant création de deux nouveaux types de sociétés commerciales, respectivement la Société Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (SURL) et la Société d'Innovation Monégasque par Actions (SIMA) qui s'ajouteraient aux Société à Responsabilité Limitée (SARL), Société Anonyme Monégasque (SAM), Société en Commandite Simple (SCS), Société en Nom Collectif (SNC).

Une fois adoptée, la proposition de loi (d'origine parlementaire) est transmise au Gouvernement qui a le choix, soit de la transformer en projet de loi, soit de ne pas y donner suite.

Le 22 juin 2023, le Conseil National a transmis les deux propositions de lois au Gouvernement Princier qui a décidé le 19 décembre 2023 d'interrompre la procédure législative.

Le Gouvernement estime également "nécessaire [...] la consécration dans le corpus juridique monégasque, d'une forme de société à associé unique, ces dispositions auront cependant vocation a être intégrées dans le cadre d'un texte plus large, relatif à la modernisation du droit des sociétés, actuellement en cours d'élaboration par les services de l'Etat."

Le projet de loi relative à la modernisation du droit des sociétés devrait comporter des "dispositions visant à faciliter le fonctionnement des divers types de sociétés, tout particulièrement la société anonyme monégasque, et qui pourrait en partie répondre aux préoccupations en matière d'attractivité des investisseurs et entrepreneurs".

Quant à la "création d'une nouvelle structure juridique par actions, dont les actionnaires ne seraient pas nécessairement dans l'obligation d'obtenir une autorisation administrative", le Gouvernement a considéré qu'elle "ne paraît pas opportune, dans la situation actuelle, au regard du rapport du Comité MONEYVAL publié le 23 janvier 2023, et de la procédure en cours devant le « International Co-operation Review Group » du Groupe d'Action Financière (GAFI) notamment s'agissant des bénéficiaires effectifs et de leurs activités". Tout en précisant que "des réflexions pourraient être initiées à terme dans un contexte plus favorable, en fonction notamment de l'évolution de la position de Monaco par rapport à ces organismes internationaux".

Source : Site Legimonaco "Actualités juridiques", 26 décembre 2023 > https://legimonaco.mc/news/202...

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Les motifs de la réforme envisagée par le Conseil National

La création de la SURL à associé unique (personne physique ou morale) offrirait à l'entrepreneur individuel la possibilité de se lancer seul avec une limitation de sa responsabilité au montant de ses apports (comme c'est le cas de la SARL - et de l'EURL française - alors que dans le cas d'une Entreprise en Nom Personnel, le patrimoine personnel de l'entrepreneur n'est pas à l'abri des risques inhérents à son activité), tout en permettant aux sociétés étrangères de s'installer à Monaco sans s'adjoindre d'associés.

La création de la SIMA à un ou plusieurs actionnaires (personnes physiques ou morales) entend quant à elle répondre aux besoins des startups et porteurs de Projets Innovants, de lever des fonds auprès d'investisseurs et permettre leur installation durable en Principauté, dans le prolongement de l'incubateur MonacoTech et du dispositif "PASS Startup Programme". Cette forme juridique pourrait aussi bénéficier aux sociétés étrangères qui souhaiteraient s'installer à Monaco pour y développer des Projets Innovants.

Dans la veine du projet de loi n° 1039 relative à l’utilisation d’un dispositif d’enregistrement numérique sur un registre partagé par les sociétés anonymes et les sociétés à responsabilité limitée (issu de la proposition de loi n° 246), les propositions de lois n° 256 et 257 s'inscrivent dans l'objectif de dématérialisation du droit des sociétés, de gestion plus souple et rapide de la société, en prévoyant l'utilisation d'un registre conservé sous forme numérique, soit sur le cloud souverain monégasque, soit en faisant usage d'une "technologie de registres distribués".**

** La définition de la "technologie de registres distribués" a été intégrée à l'article 1er de la Loi n° 1.383 pour une Principauté numérique par la Loi n° 1.528 du 7 juillet 2022 portant modification de diverses dispositions en matière de numérique et réglementation des activités des prestataires de services sur actifs numériques ou sur crypto-actifs ("une technologie d’enregistrement distribué de données chiffrées, qui permet de garantir la disponibilité, l’authentification, la traçabilité, l’intégrité, la confidentialité et la conservation des opérations effectuées").
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Le dispositif de la réforme envisagée par le Conseil National

¤ La Société Unipersonnelle à Responsabilité Limitée (SURL) [Proposition de loi n° 256]

Objectifs

  • La création d'une société commerciale avec un associé unique offrirait aux entrepreneurs individuels une alternative à l'Entreprise en Nom Personnel qui ne permet pas de protéger le patrimoine personnel de l’entrepreneur en cas d'échec.
  • Ce nouveau type de société viendrait "enrichir la palette des véhicules sociétaires que peuvent emprunter les sociétés étrangères pour s'installer en Principauté, mais aussi, servir de zone de contact avec les réglementations européennes en offrant un type de société qui puisse correspondre aux critères de ces régulations tout en préservant la spécificité monégasque".
  • L'ouverture de la SURL à des "professions qui n'entrent pas dans le cadre des "professions réglementées" mais qui méritent, de par leur nature, une attention plus soutenue que celle prévue par le régime de l'autorisation préalable (...) permettrait non seulement de leur offrir un cadre sécurisé pour leur développement économique - ce qui participerait aussi à l'attractivité de la Principauté - mais surtout permettrait la régulation, la transparence, le contrôle social et éthique d'activités économiques encadrées".

Caractéristiques

Il est proposé de créer les nouveaux articles 35 bis à 35 bis-8 du Code de Commerce.

En complément, les règles concernant les SARL. seraient applicables à la SURL, dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions particulières des articles 35 bis et suivants.

Il serait d'ailleurs facile de basculer ultérieurement vers le statut juridique de la SARL (ne serait pas subordonné à la délivrance d’une nouvelle déclaration ou autorisation administrative d’exercer, sous réserve de se conformer aux articles articles 35 bis-1 à 35 bis-6, et sans préjudice de la déclaration ou de la délivrance de l’autorisation requise pour les futurs associés).

De même, s'agissant de la transformation d’une activité en nom personnel en SURL.

  • La SURL serait constituée par un associé unique, personne morale ou personne physique, qui ne supporterait les pertes qu'à concurrence de ses apports en numéraire et/ou en nature (apports en industrie exclus). Le patrimoine personnel de l’associé unique serait donc protégé (comme pour les SARL).
  • La SURL pourrait avoir un objet commercial ou l'exercice d'une profession encadrée Le législateur suggère de développer la notion de "professions encadrées par le biais d'ordonnances souveraines" (distincte des "professions réglementées") qui pourraient poursuivre un objet commercial ou civil (par exemple : :agents d’artistes et de joueurs, agents de sécurité privé, concierges privés, assistants personnels, coachs sportifs, chauffeurs privés).
  • L'associé unique et le gérant n'auraient pas la qualité de commerçant. L'associé unique pourrait exercer la fonction de gérant.
  • Le capital social minimum serait de 5.000 € lorsque l'associé unique est une personne physique et de 15.000 € lorsque l'associé unique est une personne morale. Les apports en nature devraient obligatoirement être intégralement libérés lors de la création de la SURL, de même que les apports en numéraire à concurrence d'un montant au moins égal au capital minimal, par des versements sur un compte ouvert à cette fin auprès d'un établissement de crédit établi en Principauté. A l'origine, la proposition de loi prévoyait lorsque l'associé unique est une personne morale un capital social minimum de 20.000 €. La version consolidée l'a abaissé à 15.000 € pour l'aligner sur celui de la SARL prévu à l’article1er de l’Ordonnance Souveraine n°993 du 16 février 2007).
  • Faculté de prévoir dans les statuts de la SURL que le capital social sera variable (susceptible d'augmentation par des versements successifs et de diminution par la reprise totale ou partielle des apports effectués), dans une fourchette allant du montant du capital initial jusqu'à 10 fois cette somme.
  • La gestion de la SURL, à titre onéreux ou gratuit, pourrait être directe par l'associé, ou par le biais de mandataires (personnes physique). A l'origine, la proposition de loi prévoyait la possibilité que le mandataire soit une personne morale, laquelle a été supprimée dans la version consolidée afin d’éviter une dichotomie de fonctionnement avec la SARL, et faciliter le cas échéant le basculement vers la SARL.
  • Les actes de la SURL seraient enregistrés dans un registre conservé sous forme numérique, soit sur le cloud souverain monégasque, soit en faisant usage d'une technologie de registres distribués.

Une Ordonnance Souveraine viendrait préciser :

  • les modalités de publicité et d'information du Répertoire du Commerce et de l'Industrie (RCI) pour les apports et reprises effectués par l'associé unique ;
  • les modalités de transformation de la SURL en SARL, les formalités et mesures de publicité afférentes auprès du RCI.

¤ La Société d'Innovation Monégasque par Actions (SIMA) [Proposition de loi n° 257]

Objectifs

  • Mettre le droit monégasque des sociétés en adéquation avec les contraintes propres aux startups une fois la période d'incubation au sein de MonacoTech écoulée (pendant laquelle elles bénéficient du régime dérogatoire "PASS Startup Programme" leur permettant d'avoir une existence administrative), en offrant une alternative à la Société à Responsabilité Limitée (SARL) ou la Société Anonyme (SAM) qui seules actuellement permettent de "relever le défi des levées de fonds" (l'Entreprise en Nom Personnel s'opposant à toute levée de fonds auprès d'investisseurs).
  • Eviter de "voir des startups incubées au sein de Monacotech, qui ont donc bénéficié du support administratif ou financier de l'Etat, être contraintes de quitter la Principauté ou de créer des sociétés holdings hors de [ses] frontières, pour bénéficier plus facilement du soutien d'investisseurs internationaux et notamment de ce que l'on nomme les "Business Angels", de structures publiques de financement, d'investisseurs avertis, de Family Offices étrangers, de fonds ou d'investissements."
  • Ouvrir cette alternative aux sociétés (étrangères) qui n'ont pas été incubées au sein de MonacoTech.
  • Répondre aux besoins des investisseurs et "envisager la numérisation, l'automatisation et la standardisation non seulement de la création mais aussi de la gestion de ce type de société dans le respect des spécificités monégasques".

Caractéristiques

Il est proposé de créer les nouveaux articles 44 bis à 44 bis-7 du Code de Commerce. Les règles concernant les Sociétés Anonymes Monégasques (SAM) seraient applicables à la SIMA dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions particulières des articles 44 bis 1 et suivants régissant la SIMA et aux dispositions réglementaires y afférentes.

  • La SIMA pourrait être constituée par une ou plusieurs personnes morales ou physiques qui ne supporteraient les pertes qu'à concurrence de leurs apports. Ce régime serait ainsi ouvert aux porteurs de Projets Innovants à Monaco et aux sociétés étrangères qui souhaiteraient s'installer à Monaco pour y développer de tels projets.
  • La SIMA devrait avoir un objet social la rattachant aux secteurs de l’innovation ou de la recherche, ou bénéficiant d'un label "Innovation" décerné par une Commission spéciale selon les dispositions prévues par ordonnance souveraine. La Commission des Finances et de l’Economie Nationale "a estimé qu’une société est innovante dès lors qu’elle produit, commercialise et continue d’améliorer son produit", mais "n’a pas souhaité encadrer strictement et légalement cette définition afin que celle-ci puisse bénéficier de son plein effet en lui permettant de s’adapter aux éventuelles évolutions de notre société. En outre, une telle dynamique permettrait à ces sociétés de développer, parallèlement à cette première activité, d’autres innovations relatives à leur objet social."
  • Le capital social minimum serait de 20.000 € (alignement avec les "seuils exigés en pratique pour pouvoir être exigible aux investissements des structures d'investissement public en Europe).
  • Faculté de prévoir dans les statuts de la SIMA que le capital social sera variable (susceptible d'augmentation par des versements successifs des actionnaires ou l'admission de nouveaux actionnaires, et de diminution par la reprise totale ou partielle des apports effectués), dans une fourchette allant jusqu'à 1000 fois la valeur du capital originel.
  • Les actions de la SIMA seraient nominatives et dématérialisées, leur propriété résultant de l'inscription sur un registre conservé sous forme numérique, soit sur le cloud souverain monégasque, soit en faisant usage d'une technologie de registres distribués.
  • Les statuts fixeraient librement les conditions dans lesquelles la SIMA est dirigée, représentée, ainsi que les relations entre actionnaires.
  • Le fondateur pourrait bénéficier d'un système de création numérisée et automatisée de la SIMA par l'usage de statuts types disponibles sur le site Internet du Gouvernement, offrant le choix d'incorporer ou non les clauses statutaires prévues aux articles 44 bis 5-1 à 44 bis 5-4, adaptées aux startups et aux sociétés innovantes, telles les clauses "sweat for equity" ("équité de la sueur") aidant au démarrage en palliant au manque de trésorerie et à l'absence de moyens financiers pour rémunérer les équipes par un salaire : rémunération de l'apport en industrie de collaborateurs, conseils et autres membres de l'équipe par des actions pouvant être inaliénables pendant une durée maximale de 10 ans.
  • S'agissant de l'évaluation de la valeur des apports en nature ou en industrie, le recours à un commissaire aux apports serait, ou non, obligatoire selon le montant.
  • La SIMA pourrait émettre des actions de préférence, à savoir des actions à droit de vote multiple et des actions à dividende prioritaire, utiles lors d’opérations de levée de fonds. Les statuts pourraient prévoir que les actions détenues peuvent être converties en actions à droit de vote multiple ou en actions à dividendes prioritaires. Il s'agit de permettre aux fondateurs de garder le contrôle de leur projet tout en garantissant aux investisseurs la protection de leurs intérêts économiques.
  • Les statuts pourraient soumettre toute cession d'actions à l'agrément préalable de la société. Le mécanisme d'agrément "favorise l'information des actionnaires sur l'évolution de la répartition du capital et peut servir de déclencheur à des clauses de préemption, de sorties conjointes selon les dispositions statutaires ou les accords entre actionnaires".
  • Les statuts pourraient prévoir la cession forcée d'actions et la suppression des droits non pécuniaires tant que l'actionnaire n'a pas procédé à cette cession. Afin de pouvoir "débloquer des situations entre actionnaires".
  • LA SIMA serait autorisée à ne désigner un commissaire aux comptes que lors du dépassement, à la clôture d'un exercice social, de deux des trois seuils suivants : - total du bilan supérieur à 1.500.000 € ; montant du chiffes d'affaires HT supérieur à 2.500.000 € ; nombre moyen des salariés au cours de l'exercice supérieur à 20.

Une Ordonnance Souveraine viendrait préciser :

  • les secteurs de l’innovation ou de la recherche ou bénéficiant d'un label "Innovation" ;
  • les modalités d'information du Répertoire du Commerce et de l'Industrie (RCI) pour les apports et reprises des apports ;
  • le montant seuil des apports en nature ou en industrie, au-dessous duquel le recours à un commissaire aux apports n'est pas obligatoire.
  • les conditions d'émission des actions à droit de vote multiple et des actions à dividende prioritaire.


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