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23

nov.
2023

Actualités juridiques

Droit bancaire et financier

Droit international et européen

Droit immobilier et de la construction

Droit des assurances

23/ nov.
2023

Actualités juridiques

Droit bancaire et financier — Droit international et européen — Droit immobilier et de la construction — Droit des assurances

Droit à l’oubli (assurance emprunteur) et autres mesures facilitant l’accès au crédit (projet de loi n° 1085)

Le projet de loi n° 1085 (gouvernemental) relative au droit à l’oubli et à d’autres mesures facilitant l’accès au crédit (12 articles) a été reçu par le Conseil National le 22 novembre 2023.

Il fait suite à la proposition de loi n°254 (d'origine parlementaire) instituant le droit à l'oubli en matière d'assurance de prêt bancaire, adoptée le 15 juin 2022.

Des textes réglementaires complèteront la Loi (Ordonnance Souveraine et Arrêté Ministériel).

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SYNTHESE

Consécration du droit à l'oubli (soumis à conditions) qui permettrait de ne pas déclarer une ancienne pathologie (figurant sur la liste qui sera fixée par ordonnance souveraine qui devrait inclure les cancers et l'hépatite C) à un assureur ou un établissement de crédit lors de la souscription d'un contrat d'assurance emprunteur, pour les demande d'octroi d'un prêt à la consommation ou d'un prêt professionnel destiné à l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle, ou d'un prêt immobilier.

Obtention de contrats d'assurance emprunteur dans les conditions standards ou s'en rapprochant, à savoir sans surprime ni exclusion de garantie ou avec des surprimes plafonnées pour les personnes présentant ou ayant présenté un risque aggravé de santé et I'ayant déclaré, dès lors que la pathologie dont la personne est atteinte fait partie de la liste des pathologies figurant au sein d'une grille de référence, pour les prêts immobiliers ou les prêts professionnels en vue de l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle (prêts à la consommation exclus).

Interdiction des assureurs ou établissements de crédit de retenir des informations médicales relatives à une pathologie bénéficiant du droit à l'oubli.

Exonération dans certains cas de fournir le questionnaire sur l'état de santé ou de se soumettre à des examens médicaux.

Possibilité de saisir une Commission de médiation avant toute action judiciaire, en cas de conflit entre les professionnels (établissements de crédit, compagnies d'assurance ou assureurs) et les personnes présentant un risque aggravé de santé.

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EN DETAIL

Objet de la réforme

Le projet de loi n° 1085 vise à :

  • "faciliter l'accès à l'emprunt bancaire pour des personnes placées, du fait des aléas de la vie, en situation de risque aggravé de santé en raison d'une maladie ou d'un handicap, dans la mesure où l'assurance emprunteur est souvent une condition d'obtention des prêts. Dans ce cadre, plusieurs mesures ont vocation à être juridiquement consacrées, au-delà du seul droit à l'oubli". (Exposé des motifs, p. 1)
  • "doter le corpus jurus de moyens contraignants de lutte contre la discrimination qui découlerait d'un refus d'assurance emprunteur ou de l'application de surprimes, rendant difficile, voire impossible, le recours au crédit bancaire pour des personnes présentant un "risque" pour les professionnels en raison d'une maladie ou d'un handicap" (Exposé des motifs, p. 3)

Fondements de la réforme

La réforme est fondée sur les engagements internationaux de la Principauté en matière de lutte contre toute forme de discrimination :

Elle trouve également appui sur les travaux des organisations internationales en la matière, entre autres :

Enfin, le projet de loi n° 1085 tient compte du droit français (Code de la santé publique) et de la réglementation des assurances dans le cadre des relations franco-monégasques :

  • Convention AERAS qui vise en France à faciliter l'accès au prêt immobilier ou professionnel et au crédit à la consommation des personnes dont l'état de santé ne permet pas d’obtenir une couverture d’assurance aux conditions standard du contrat, c’est-à-dire sans majoration de tarif ou exclusion de garanties. Révisée à plusieurs reprises depuis sa signature le 6 juillet 2006, elle a renforcé le droit à l'oubli (Article L1141-5, Article L1141-2 du Code de la Santé Publique français). La Convention est conclue entre l'Etat, les organisations professionnelles représentant les établissements de crédit, les sociétés de financement, les entreprises d'assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance ainsi que des organisations nationales représentant les malades et les usagers du système de santé, et les personnes handicapées.
  • Convention relative à la règlementation des assurances, signée à Paris le 18 mai 1963 qui prévoit que réglementation des assurances établie par le Gouvernement Princier "devra être coordonnée avec celle de la République française" (Article 1er).

Dispositif du projet de loi n° 1085 (avant passage en Commission)

¤ Dispositions générales (Chapitre Ier)

  • Définitions : "assureur" ; "établissement de crédit" ; "personne présentant un risque aggravé de santé" ; "assurance emprunteur" ; "surprime d'assurance". (art. 1er)
  • Définition par Ordonnance Souveraine des modalités relatives à la formation et à l'instruction de la demande d'assurance, au contenu et à la communication de la décision de l'assureur et de l'établissement
    de crédit, ainsi que la durée de validité de toute proposition d'assurance. (art. 2)
  • Remise par les établissements de crédit ou assureurs d'un document d'information sur les mesures prévues par la Loi (simultanément au questionnaire de santé), aux personnes souscrivant un contrat d'assurance en relation avec un emprunt entrant dans les conditions de la Loi. (art. 2)

¤ Mesures d'aide à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé (Chapitre II)

→ DROIT A L'OUBLI (Section I)

  • Définition du droit à l'oubli : toute personne bénéficie d'un droit à l'oubli lui permettant de ne pas déclarer une ancienne pathologie, figurant sur la liste fixée par ordonnance souveraine, à un assureur
    ou un établissement de crédit lors de la souscription d'un contrat d'assurance emprunteur. (art. 3)
  • Conditions d'exercice du droit à l'oubli (dont les modalités seront précisées par Ordonnance Souveraine) (art. 4) :
    • 1) La demande d'assurance doit survenir à l'occasion d'une demande d'octroi d'un a) prêt à la consommation affecté ou dédié, ou b) d'un prêt professionnel destiné à l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle, ou c) d'un prêt immobilier.
    • 2) Le protocole thérapeutique doit être achevé depuis une certaine durée (fixée par Ordonnance
      Souveraine) ;
    • 3) L'échéance du contrat d'assurance doit intervenir avant que l'emprunteur atteigne un certain âge (fixé par Ordonnance Souveraine).
  • Obligation de déclaration de l'emprunteur à l'assureur ou à l'établissement de crédit de toute pathologie ou affection autre que celles figurant sur la liste fixée par ordonnance souveraine précitée, tout facteur de risque, toute situation actuelle d'invalidité ou d'inaptitude au travail, en lien ou non avec les pathologies relevant du droit à l'oubli, ou toute conséquence de l'une de ces pathologies, affections ou des traitements y afférents, notamment les effets secondaires. (art. 5)
  • Interdictions des assureurs ou établissements de crédit de : retenir aucune information médicale relative à une pathologie bénéficiant du droit à l'oubli, même lorsqu'il en est fait état par l'emprunteur ; et d'appliquer aucune surprime ni exclusion de garantie à l'emprunteur du fait d'une pathologie figurant sur la liste précitée. (art. 6)

→ BENEFICE D'UNE ASSURANCE SANS SURPRIME OU EXCLUSION DE GARANTIE OU AVEC UNE SURPRIME PLAFONNEE (Section II)

  • Toute personne ayant déclaré à un assureur ou établissement de crédit présenter une pathologie, y compris chronique, constituant un risque aggravé de santé et figurant dans une grille de référence (définie par arrêté ministériel) pourrait bénéficier d'une assurance, sans surprime ou exclusion de garantie ou avec une surprime plafonnée, à certaines conditions (art. 7, 8) :
    • 1) La demande d'assurance soit survenir à l'occasion d'une demande d'octroi d'un a) prêt immobilier ou d'un b) prêt professionnel destiné à l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle ;
    • 2) Lorsqu'il s'agit de l'acquisition d'une résidence principale, le montant assuré doit concerner les opérations de prêts immobiliers dont la part assurée n'excède pas un certain montant (fixé par Ordonnance Souveraine) sans tenir compte des crédits relais. Dans les autres cas de prêts immobiliers et de prêts professionnels, le montant assuré s'appliquerait aux contrats relatifs à un encours cumulé de prêts, dont la part assurée n'excède pas un certain montant (fixé par ordonnance souveraine) ;
      3) L'échéance du contrat d'assurance doit intervenir avant que l'emprunteur atteigne un certain âge
      (fixé par ordonnance souveraine).
    • La grille de référence listerait des pathologies pour lesquelles des données de la science disponible permettent de conclure qu'une assurance emprunteur peut être accordée dans des conditions se rapprochant des conditions standard. Elle définirait, par pathologie, les délais à compter desquels des assurances emprunteur sont accordées, en précisant notamment la date de référence à partir de laquelle ces délais courent. Elle préciserait les critères d'accès à ces conditions d'assurance et les taux de surprime maximaux applicables.
  • Interdiction d'appliquer aux personnes présentant un risque aggravé de santé, conjointement une surprime et une exclusion de garantie au titre d'une même pathologie pour les contrats d'assurance dans le cadre de la souscription d'un crédit immobilier ou professionnel (art. 9).

→ EXONERATION DE FOURNIR DES INFORMATIONS RELATIVES A L'ETAT DE SANTE OU DE SE SOUMETTRE A DES EXAMENS MEDICAUX (Section III)

  • Aucune information relative à l'état de santé, ni aucun examen médical de l'assuré ne pourrait être sollicité par l'assureur, lorsque le contrat d'assurance a pour objet de garantir, en cas de survenance
    d'un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant restant
    dû au titre d'un contrat de crédit à la consommation, soit le paiement de tout ou partie des
    échéances dudit prêt
    , sous certaines conditions (art. 10) :
    • 1) Le montant assuré ne dépasse pas un certain montant (fixé par Ordonnance Souveraine) ;
    • 2) La durée de remboursement est inférieure ou égale à une certaine durée (fixée par Ordonnance
      Souveraine) ;
    • 3) L'âge de l'emprunteur n'excède pas un certain âge (fixé par Ordonnance Souveraine) ;
    • 4) l'emprunteur déclare sur l'honneur un non-cumul de prêts au-delà du plafond susmentionné.
    • En France (2023), le montant du prêt ou cumul des prêts ne doit pas dépasser 17 000 €, la durée de remboursement doit être inférieure ou égale à 4 ans et l'âge du candidat doit être de 50 ans au plus en début de prêt.
  • Aucune information relative à l'état de santé ni aucun examen médical de l'assuré ne pourrait être sollicité
    par l'assureur, lorsque le contrat d'assurance a pour objet de garantir, en cas de survenance
    d'un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant restant
    dû au titre d'un contrat de crédit immobilier pour l'acquisition d'un bien à usage d'habitation
    ou à usage professionnel, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, sous certaines conditions (art. 11) :
    • 1) La part assurée sur l'encours cumulé des contrats de crédit n'excède pas un certain montant
      (fixé par Ordonnance Souveraine) ;
    • 2) L'échéance de remboursement du crédit contracté intervient avant que l'emprunteur atteigne un certain âge (fixé par Ordonnance Souveraine).
    • En France (2023), la part assurée sur les encours cumulés des contrats de crédit n'excède pas la somme de 200 000 et l'échéance de remboursement du crédit contracté est antérieure au 60e anniversaire de l'assuré.

¤ Commission de médiation (Chapitre III)

  • Institution d'une Commission chargée d'examiner les réclamations individuelles concernant l'application de la loi, le cas échéant, d'effectuer la médiation entre les emprunteurs, d'une part, et les assureurs ou les établissements de crédit, d'autre part (dans les conditions et selon les modalités définies par Ordonnance Souveraine, y compris sa composition et son mode de fonctionnement) (art. 12).

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