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08

oct.
2025

Actualités juridiques

Droit international et européen

Droit public

08/ oct.
2025

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Droit international et européen — Droit public

Projet de loi n° 1109 relative à la réserve judiciaire et portant aménagement de diverses dispositions en matière de désignation de magistrats auprès d’entités administratives (voté)

Le projet de loi n° 1109 relative à la réserve judiciaire et portant aménagement de diverses dispositions en matière de désignation de magistrats auprès d’entités administratives (2025-05, 6 juin 2025 consolidé, 9 articles) déposé et renvoyé devant la Commission de Législation le 18 juin 2025, a été voté le 2 octobre 2025.

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SYNTHÈSE

Le Rapport d'évaluation du Comité MONEYVAL (Résultat Immédiat 7 (Enquêtes et poursuites en matière de blanchiment de capitaux), point b), p. 51) a recommandé de "prendre des mesures pour garantir un avancement plus rapide des enquêtes de blanchiment de capitaux parmi lesquelles, l'augmentation des ressources dédiées au Procureur Général et aux juges d'instruction, y compris le recrutement de personnel judiciaire".

Le projet de loi n° 1109 vise dans cette droite ligne "à apporter une réponse opérationnelle aux recommandations du GAFI, en assurant une base juridique au renforcement des effectifs des juridictions et d'autres entités appelées à concourir à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive et la corruption" (Exposé des motifs du projet de loi) :

  • Création d’une réserve judiciaire composée d’anciens magistrats (de nationalité française ou étrangère sous condition de maîtriser la langue française) pour compléter les formations de jugement et apporter à titre exceptionnel un appui aux magistrats de carrière en activité (mesure dérogatoire et ponctuelle en cas de surcharge ou d'urgence) - A noter : la réflexion engagée par la Direction des Services Judiciaires pour répondre au besoin de renforcement des effectifs a envisagé une autre voie d'accès à la magistrature, complémentaire à celle prévue par le statut actuel de 2009 au titre du recrutement sur concours des magistrats référendaires : l'intégration directe dans le corps judiciaire pour les personnes de nationalité monégasque appelées à devenir magistrat de carrière. Ce volet est suspendu pour permettre une poursuite de la réflexion (Exposé des motifs du projet de loi).
  • Répondre aux difficultés rencontrées pour la désignation du responsable de la formation de sanction de l'Autorité Monégasque de Sécurité Financière (AMSF) et prévenir celles qui pourraient concerner le responsable du Service de gestion des avoirs saisis et confisqués.

La Commission de Législation saisie a amendé le texte initial après consultation de la Direction des Services Judiciaires, du Haut-Commissariat à la Protection des Droits et à la Médiation (Avis publié), du Conseil Economique, Social et Environnemental, de l’Autorité Monégasque de Sécurité Financière (AMSF), des huissiers, de l’Ordre des avocats-défenseurs et avocats, et du Syndicat des magistrats de la Principauté de Monaco.

Le Conseil National a "invit[é] le Gouvernement à poursuivre la réflexion sur l’avenir de la magistrature monégasque, afin d’apporter une réponse satisfaisante
et durable au manque d’effectif en Principauté
", avec des "réformes nécessaires pour accroître l’attractivité de la magistrature, qu’il s’agisse de la revalorisation de l’échelle indiciaire ou de l’évolution des modalités d’accès à la profession, mais aussi de la création de postes supplémentaires de magistrats permanents", relevant que "le recours aux magistrats réservistes ne peut s’envisager que comme une mesure dérogatoire et ponctuelle". (Rapport sur le projet de loi n° 1109)

Le Conseil National a également mis en lumière le rôle du Haut Conseil de la Magistrature (dont l'avis est requis dans le cadre du processus de sélection des magistrats réservistes) "dans le recrutement de l'ensemble des magistrats nommés en Principauté, et ce conformément aux engagements internationaux de Monaco (...) invit[a]nt ainsi le Gouvernement à déposer un projet de loi visant à consacrer légalement la pratique qui a été instaurée à la suite des recommandations du groupe d'Etat contre la Corruption (GRECO), selon laquelle tous les candidats, y compris les magistrats détachés, sont auditionnés par le Haut Conseil, lequel rend un avis général joint au rapport transmis au Prince Souverain". (Ibidem) - A noter : le rapport de situation de Monaco sur les mesures adoptées pour mettre en œuvre les recommandations du GRECO doit être soumis au plus tard le 31 mai 2026. Pour plus d'information, lire notre publication > GRECO • Evolution du dispositif de lutte contre la corruption à Monaco (2024-2026)

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EN DÉTAIL

→ Régime applicable aux magistrats réservistes : insertion de nouveaux articles 64-1 à 64-15 dans la Loi n° 1.364 du 16 novembre 2009 portant statut de la magistrature, modifiée :

  • Objet du recrutement des magistrats réservistes : à titre exceptionnel, accomplissement d'activités de nature juridictionnelle ou administrative, dans le cadre d'un renforcement temporaire des effectifs, selon les besoins, de la Direction des Services Judiciaires et des services qui lui sont rattachés, du tribunal de première instance, de la cour d'appel, du tribunal criminel ou du parquet général (Tribunal Suprême et Cour de Révision exclus). NB :
  • Conditions requises : dans le respect des engagements internationaux de la Monaco, nationalité monégasque ou étrangère ; rayé des cadres pour cause de retraite ou de démission ; expérience d'au moins 10 années en qualité de magistrat ; jouissance des droits civils et politiques ; exigence d'honorabilité ; âge limite de 77 ans. Les candidats de nationalité étrangère autre que française, doivent maîtriser la langue française. Examen des demandes par ordre de priorité : 1°) les personnes de nationalité monégasque ; 2°) les personnes de nationalité française ayant exercé des fonctions de magistrat à Monaco ; 3°) les personnes de nationalité étrangère ayant exercé des fonctions de magistrat à Monaco ; 4°) les personnes qui ne relèvent pas des catégories prévues aux chiffres 1°), 2°) et 3°) qui n'ont pas d'expérience de magistrat à Monaco (si leur demande est retenue, obligation de suivre une formation spécifique en droit monégasque).
  • Obligation de prêter serment avant d'exercer les fonctions, lors de la première inscription sur la liste.
  • Inscription sur la liste des magistrats réservistes : par arrêté du Directeur des Services Judiciaires après avis du Haut Conseil de la Magistrature, pour une durée de 3 ans, renouvelable.
  • Missions : au cours de cette période, un réserviste peut se voir confier successivement, diverses missions auprès de la Direction des Services Judiciaires, du parquet général et de juridictions (tribunal de première instance, cour d'appel, tribunal criminel), sans toutefois qu'il ait à traiter d'affaires qu'il aurait eu à connaitre dans le cadre de fonctions précédentes. La nature des missions qui peuvent lui être proposées peut être administrative (présider ou siéger au sein d'une commission administrative ou d'une autorité administrative indépendante dont la composition implique la présence de magistrats) ou juridictionnelle (sans qu'il puisse, au siège, présider une formation collégiale et, au parquet, occuper le siège du ministère public aux audiences de la Cour de Révision et du Tribunal Suprême). Les magistrats réservistes ne peuvent pas composer majoritairement une formation collégiale de la juridiction auprès de laquelle ils sont affectés, sauf sur rapport du premier Président de la cour d’appel en cas de difficulté sérieuse pour composer la formation de jugement avec des magistrats permanents. Ils ne peuvent ni composer une juridiction siégeant à juge unique ni exercer des fonctions de juge d’instruction.
  • Durée limite d'activité : 260 demi-journées par année civile.
  • Contrat de magistrat réserviste : précise notamment sa date d'effet, la durée, la nature des missions confiées, les modalités de l'affectation, le mode de rémunération des missions effectuées ainsi que les motifs et conditions de sa cessation.
  • Régime indemnitaire : remboursement des frais inhérent à la mission dans des conditions définies par arrêté du Directeur des Services Judiciaires ; montant fixe, correspondant pour chaque demi-journée, à un montant égal à 1/60e du traitement mensuel d'un magistrat du premier grade, dernier échelon, majoré, selon les missions exercées, d'un pourcentage défini par arrêté du Directeur des Services Judiciaires.
  • Incompatibilité : l'exercice d'une activité à l'étranger équivalente à celle de magistrat réserviste n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions de magistrat réserviste à Monaco, dans la mesure où cette situation ne présente pas de risque de conflit avec l'exercice de leurs fonctions. En cas de survenance d’une situation susceptible d’être une cause d’empêchement de la poursuite de sa fonction, le magistrat réserviste en informe sans délai le Directeur des Services Judiciaires, qui lui fait connaître, le cas échéant, et après un entretien, la situation d’incompatibilité entre la nouvelle situation en cause et la poursuite de l’exercice de ses missions. Sont applicables aux magistrats réservistes les dispositions des articles 10 et 11 de la Loi n° 1.364 (incompatibilité entre les fonctions de magistrat et toute autre fonction publique ou activité lucrative, à l'exception de celles expressément autorisées par le Directeur des Services Judiciaires comme l'enseignement ou d'autres activités ne portant pas atteinte à l'indépendance ou à la dignité de la fonction judiciaire).
  • Procédure et sanctions disciplinaires pouvant être prononcées à l'égard du magistrat réserviste.

→ Aménagement de certaines dispositions de la Loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires, modifiée

  • Précision des conditions dans lesquelles les magistrats réservistes prennent part à la délibération, avec les magistrats.
  • Assouplissement des conditions de désignation du directeur du service de gestion des avoirs saisis et confisqués : peuvent être désignés un magistrat de l'ordre judiciaire en position d'activité, un magistrat réserviste ou un magistrat rayé des cadres pour cause de retraite ou de démission.

→ Modification de la Loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive et la corruption, modifiée

  • Composition de la formation de sanction de l'Autorité Monégasque de Sécurité Financière (AMSF) : elle peut être composée de magistrats réservistes, aux côtés de membres magistrats, fonctionnaires et agents du service.
  • Désignation du président de la formation de sanction : la présidence peut être assurée, dans l'ordre de priorité suivant, par une personne : 1°) disposant d'une expérience juridictionnelle d'au moins 3 années dans l'ordre judiciaire monégasque en qualité de magistrat, en activité ou non ; 2°) disposant d'une expérience juridictionnelle d'au moins 3 années en France en qualité de magistrat, en activité ou non, ou inscrite sur la liste des magistrats réservistes. En cas d'empêchement, la présidence pourra être assurée par un suppléant conformément à cet ordre de priorité, recruté dans les mêmes conditions définies par ordonnance souveraine.

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