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30/ juin
2023

Actualités juridiques — Articles

Droit social

La Loi n°1.547 du 22 juin 2023 relative au don de congés publiée

La Loi n° 1.547 du 22 juin 2023 relative au don de congés (JDM n° 8649 du 30 juin 2023), issue du projet de loi n° 1073 (2022-17 du 1er décembre 2022) déposé le 5 décembre 2022 et voté le 15 juin 2023, permet à un salarié du secteur privé de donner un ou plusieurs jours de repos à un collègue qui doit faire face à un décès ou une autre situation familiale d’une particulière gravité.

Les modalités d'application de la Loi n° 1.547 seront précisées par Ordonnance Souveraine.

Il est noter que la Commission des Intérêts Sociaux et des Affaires Diverses (CISAD) a amendé le projet de loi n° 1073 afin d'harmoniser le dispositif existant de don de congés applicable aux fonctionnaires de l’Etat et de la Commune avec le dispositif nouveau de don de congés applicable aux salariés du secteur privé (modification de l'article 49-2 de la Loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires de l’État, et de l'article 45-2 de la Loi n° 1.096 du 7 août 1986 portant statut des fonctionnaires de la Commune).

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Présentation

Dans le secteur public, depuis la Loi n° 1.527 du 7 juillet 2022 modifiant la Loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires de l’État, un fonctionnaire a la possibilité de renoncer sans contrepartie à tout ou partie de ses jours de congés, au bénéfice d’un autre fonctionnaire ou d'un agent contractuel de l'Etat qui assume un enfant malade, handicapé ou victime d’un accident ou qui vient en aide à un proche handicapé ou en perte d’autonomie (article 49-2 ).

Cette possibilité est également ouverte aux fonctionnaires de la Commune à la faveur d'un autre fonctionnaire ou agent contractuel de la Commune depuis la Loi n° Loi n° 1.538 du 16 décembre 2022 modifiant la Loi n° 1.096 du 7 août 1986 portant statut des fonctionnaires de la Commune (article 45-2).

Les agents contractuels de l’Etat peuvent également effectuer dans les mêmes conditions un don de congés au profit d'un autre agent contractuel ou d'un fonctionnaire depuis l’Ordonnance Souveraine n° 9.640 du 23 décembre 2022 portant dispositions générales de caractère statutaire applicables aux agents contractuels de l’Etat (article 74).

Dans le secteur privé, avant cette loi, seul le secteur bancaire prévoyait le don de congés (Avenant n° 22 du 7 juillet 2021 à la Convention collective monégasque du travail du personnel des banques).

Le Législateur a tenu compte du vœu n° 2021-795 du 10 novembre 2021 du Conseil Economique, Social et Environnemental de généraliser le don de congés volontaire, anonyme et désintéressé à l’ensemble des salariés du secteur privé.

Il a de plus sollicité, entre autres, l'Avis du Haut Commissariat à la Protection des Droits, des Libertés et à la Médiation (à la lumière du droit aux loisirs et à la détente consacré par le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels ainsi que des articles 23 à 25 relatifs au droit du travail de la Déclaration universelle des droits de l'Homme) et l'Avis de la Fédération des Syndicats de Salariés de Monaco (F2SM).

L’Exposé des motifs se réfère au droit français duquel la Loi monégasque s'inspire. Le droit de congés a été consacré en France par la loi « Mathys » n° 2014-459 du 9 mai 2014 permettant le don de jours de repos à un parent d’un enfant gravement malade (articles L.1225-65-1 et L.122565-2 du Code du travail), puis la Loi n° 2018-84 du 13 février 2018 a étendu le don de congés aux situations de handicap ou de perte d’autonomie d’un proche, et ouvert le dispositif aux salariés du secteur public (article L..3142-25-1 du Code du travail).

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SYNTHESE - SECTEUR PRIVÉ

— Principe :

Un salarié de Monaco, sur sa demande (volontariat) et en accord avec l’employeur (appréciation de l’opportunité du don de congés par rapport à la disponibilité de ses équipes), peut renoncer sans que son identité soit portée à la connaissance du bénéficiaire (anonymat vis-à-vis du bénéficiaire), définitivement (impossibilité de revenir sur sa décision) et sans contrepartie (désintéressement), à tout ou partie de ses jours de congés non pris au bénéfice d’un autre salarié de l’entreprise se trouvant dans une des situations suivantes :

  • le salarié bénéficiaire exerce l’autorité parentale [ajout de la CISAD afin d'inclure le parent ne résidant pas avec son enfant ou n’ayant pas sa garde effective et permanente, par ex. un parent divorcé en garde alternée] ou assume la charge d’un enfant atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants ;
  • décès de l'enfant de moins de 25 ans, ou du conjoint, ou du partenaire d’un contrat de vie commune du bénéficiaire ; ou décès de l’enfant de moins de 25 ans dudit conjoint ou partenaire vivant sous le même toit que le bénéficiaire [ajout de la CISAD, s'inspirant des dispositions de l'article L. 1225-65-1 du Code du travail français] ;
  • le salarié bénéficiaire vient en aide à un proche atteint d’une perte d’autonomie d’une particulière gravité ou présentant un handicap (lorsque ce proche est, pour le bénéficiaire du don, l’un de ceux définis par ordonnance souveraine).

— Modalités :

• Le salarié ne pourra céder son congé annuel que « pour sa durée excédant vingt-quatre jours ouvrables », c’est-à-dire seulement sa cinquième semaine de congés payés (et non les quatre premières). Cette limite à pour objectif de concilier le don de congés avec les règles d’ordre public relatives au droit aux congés payés annuels.

L’Exposé des motifs se réfère au droit français et de l’Union Européenne (l’article 7 (1) Directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail impose un minima de 4 semaines de congés annuels) « auquel se réfère le Tribunal du travail dans ses décisions », pour estimer que « la cinquième semaine est une semaine supplémentaire, pouvant bénéficier d’un régime plus souple ».

• Le salarié bénéficiaire d’un ou plusieurs jours cédés aura droit au maintien de sa rémunération pendant sa période d’absence, assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté, et conservera le bénéfice de tous les avantages acquis avant le début de sa période d’absence.

Ainsi, l’indemnisation des congés donnés sera calculée sur la base du salaire du salarié bénéficiaire. Le salarié bénéficiaire conservera sa rémunération quel que soit le niveau de salaire du collègue qui lui a fait don de jours de congés.

Le salarié conservera son ancienneté au moment du départ en congé, et sa période d’absence sera prise en compte pour augmenter son temps d’ancienneté.

Par contre, la période d’absence au titre du don de congés ne sera pas assimilée à du temps de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés (à la différence du congé de soutien familial où c’est le cas).

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